Syndrome de Gougerot

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Homme aux yeux irrités

Le syndrome de Gougerot, encore appelé syndrome de Gougerot-Sjögren, appartient aux syndromes secs. C'est une maladie auto-immune chronique, qui touche l'ensemble des glandes exocrines (glandes qui produisent des substances sécrétées à l'extérieur de l'organisme), en particulier les glandes salivaires et lacrymales.

Elle peut aussi impacter de nombreux tissus et organes, engendrant une réaction de l'ensemble de l'organisme (maladie systémique). Cette maladie diminue fortement la qualité de vie des patients, mais elle n'engage que rarement le pronostic vital. Le point, dans la suite de notre article.

Qui peut être touché par le syndrome de Gougerot ?

Le syndrome de Gougerot est une maladie chronique relativement fréquente, qui touche entre 0,1 et 0,4 % de la population française. En fréquence, cette maladie est la seconde pathologie auto-immune systémique après la polyarthrite rhumatoïde.

La maladie se déclare exceptionnellement dans l'enfance, parfois entre 20 et 30 ans, mais le plus souvent elle se manifeste entre 40 et 50 ans. Les femmes sont les plus touchées, 90 % des malades étant de sexe féminin.

Le syndrome de Gougerot n'est pas une maladie génétique héréditaire, même s'il existe vraisemblablement une prédisposition génétique aux maladies auto-immunes. Ainsi, il peut arriver exceptionnellement que plusieurs maladies auto-immunes, semblables ou différentes, surviennent chez plusieurs membres d'une même famille. 

Bon à savoir : le syndrome de Gougerot n'est pas une maladie contagieuse.

Causes et mécanisme du syndrome de Gougerot

Le syndrome de Gougerot est une maladie auto-immune, dans laquelle le système immunitaire déclenche une réaction inflammatoire anormale induisant :

  • Une infiltration lymphoïde : les globules blancs attaquent et détruisent les glandes exocrines, particulièrement les glandes salivaires et lacrymales. Les sécrétions de salive et de larmes diminuent, provoquant un syndrome sec.
  • Une production de différents auto-anticorps (anticorps dirigés contre des cibles de l'organisme et non pas contre des corps étrangers).
  • L'infiltration lymphocytaire peut atteindre différents organes dans 2/3 des cas : poumons, reins, articulations, nerfs, vaisseaux, etc.

La cause exacte du syndrome de Gougerot demeure inconnue à ce jour. Une prédisposition génétique aux maladies auto-immunes est avancée par les chercheurs, de même que l'exposition à certains virus (cytomégalovirus, virus d'Epstein-Barr, virus coxsackies) qui pourrait déclencher la maladie.

Mais ces hypothèses ne sont pas démontrées scientifiquement. Deux formes de syndrome de Gougerot sont prises en compte :

  • Le syndrome de Gougerot primaire ou primitif (50 % des cas) : le syndrome de Gougerot n'est pas associé à une autre pathologie auto-immune.
  • Le syndrome de Gougerot secondaire survient chez une personne déjà atteinte par une autre maladie auto-immune (polyarthrite rhumatoïde, lupus érythémateux disséminé, sclérodermie, myosites, thyroïdite auto-immune, etc.)

Syndrome de Gougerot : quels symptômes ?

Le syndrome de Gougerot associe deux types de symptômes :

  • des symptômes localisés liés au syndrome sec ;
  • des symptômes systémiques (généralisés à l'ensemble de l'organisme).

Symptômes liés au syndrome sec

Le syndrome sec résulte de la destruction des glandes exocrines par les globules blancs et se manifeste par un certain nombre de symptômes :

  • Une sécheresse oculaire : la diminution de la sécrétion des larmes entraîne une rougeur des yeux, une sensation permanente de corps étranger et de sable, des brûlures ophtalmiques, une gêne face à la lumière. Ces symptômes peuvent parfois engendrer des complications comme la blépharite (inflammation des paupières) ou la kératite (inflammation de la cornée).
  • Une sécheresse buccale : la baisse de la quantité de salive provoque une sensation de bouche sèche, pâteuse, une gêne dans l'élocution, des troubles de la déglutition, des brûlures au niveau de la bouche et de la langue et une diminution du goût. La langue peut prendre un aspect lisse (sans papilles), tandis que les muqueuses buccales deviennent ternes avec un aspect vernissé. La sécheresse buccale peut être à l'origine de complications comme des caries, des aphtes, une maladie parodontale, un muguet, etc.
  • Une sécheresse bronchique : elle touche la trachée et les bronches, provoquant un enrouement et une toux sèche, plus ou moins chronique. Cette sécheresse peut mener à la survenue d'infections broncho-pulmonaires récidivantes.
  • D'autres types de sécheresse peuvent s'ajouter aux précédentes :
    • une sécheresse de la muqueuse nasale ;
    • une sécheresse de la muqueuse vaginale ;
    • une sécheresse cutanée.

Syndrome de Gougerot : symptômes systémiques

Dans 2/3 des cas, les patients présentent en parallèle du syndrome sec une atteinte systémique qui peut se matérialiser par de nombreux symptômes différents :

  • Des douleurs articulaires sous forme d'arthrites, dans 50 % des cas. Les douleurs articulaires sont le plus souvent des douleurs à la main mais elles peuvent s'étendre à d'autres articulations. Plus rarement, les articulations peuvent être gonflées. Les atteintes articulaires ne provoquent jamais de dégâts irréversibles aux articulations.
  • Des douleurs musculaires allant jusqu'à la myosite (inflammation des muscles).
  • Une fatigue importante dans la moitié des cas, parfois associée à des troubles de la concentration, voire à une dépression.
  • Une atteinte des nerfs périphériques dans 20 % des cas : ces neuropathies peuvent toucher les bras, les mains, les jambes ou les pieds et s'accompagnent de douleurs neurologiques, de sensations de fourmillements ou d'engourdissement. Un déficit moteur est très rare. L'atteinte des nerfs du système nerveux central reste exceptionnelle.
  • Une atteinte du foie, du pancréas et/ou de la glande thyroïde.
  • Une atteinte des petits vaisseaux sanguins sous la forme d'un syndrome de Raynaud : chez environ 1/3 des patients, les doigts deviennent blancs lors des expositions au froid.
  • Une hypertrophie parotidienne : les glandes parotides (glandes situées sous les oreilles) sont gonflées et peuvent s'infecter dans certains cas.
  • Une atteinte pulmonaire dans moins de 10 % des cas, pouvant évoluer très rarement vers la fibrose pulmonaire.
  • Des complications rares mais graves :
    • Une vascularite cutanée sous la forme d'un purpura ou d'une urticaire. Le purpura se manifeste par des petites taches rouges liées à la sortie des globules rouges hors des vaisseaux sanguins. Le purpura se situe le plus souvent au niveau des membres inférieurs. Très exceptionnellement, certains patients peuvent présenter une éruption cutanée du visage ressemblant à celle du lupus érythémateux disséminé.
    • Des atteintes rénales (5 % des cas) peuvent exceptionnellement conduire à une insuffisance rénale.
    • Une péricardite (inflammation de la paroi externe du cœur).
    • Un lymphome (moins de 1 % des cas).

À noter : tous les patients ne présentent pas tous ces symptômes. La nature et l'intensité des symptômes varient considérablement d'un patient à l'autre. Le retentissement de la maladie sur la vie du patient est donc très variable.

Diagnostic du syndrome de Gougerot

Le diagnostic du syndrome de Gougerot peut être difficile car les symptômes peuvent être très nombreux et très variables d'un sujet à l'autre. De plus, la maladie débute souvent de manière insidieuse avec peu ou pas de symptômes.

La sécheresse buccale et oculaire oriente le médecin vers un possible syndrome de Gougerot, surtout si le sujet présente une autre pathologie auto-immune. Pour poser le diagnostic, le médecin s'appuie sur différents examens :

  • Des examens pour mettre en évidence le syndrome sec :
    • Le test de Schirmer met en évidence la sécheresse oculaire. Une bandelette de papier filtre gradué est inséré au niveau du cul de sac conjonctival. Après 5 minutes, la longueur de la partie humidifiée par les larmes est mesurée. Si cette longueur est inférieure à 5 mm, l'hyposécrétion lacrymale est confirmée.
    • Des examens ophtalmologiques peuvent mettre en évidence une potentielle souffrance de la cornée.
    • La mesure du débit salivaire évalue la sécheresse buccale. Dans un verre gradué est récoltée la salive produite par un sujet pendant 15 minutes. L'hyposécrétion salivaire est établie lorsque la quantité de salive est inférieure à 1,5 ml.
  • Des examens généraux :
    • Des analyses de sang peuvent détecter des auto-anticorps spécifiques (notés anti-SS-A et anti-SS-B).
    • Une biopsie des glandes salivaires peut mettre en évidence l'infiltration lymphocytaire. Une glande salivaire est prélevée au niveau de la face interne de la lèvre inférieure et analysée au laboratoire de cytologie.
  • Des examens spécifiques adaptés aux symptômes spécifiques du patient (électromyogramme, scanner thoracique, IRM cérébrale ou médullaire, biopsie rénale ou ganglionnaire, etc.).

Syndrome de Gougerot : évolution

Le syndrome de Gougerot débute souvent insidieusement et lentement. L'évolution de la maladie est généralement très lente. La maladie peut rester stable pendant de nombreuses années. La surveillance des patients est cependant nécessaire pour prévenir la survenue des complications.

Le syndrome de Gougerot présente schématiquement deux formes :

  • une forme chronique, souvent limitée au syndrome sec et à la fatigue, parfois accompagnés de douleurs diffuses ;
  • une forme évolutive ou systémique (15 % des cas), caractérisée au fil des années par des manifestations systémiques, parfois graves.

La survenue de complications graves reste rare et imprévisible, mais certains patients sont d'emblée plus à risques de développer une forme sévère de la maladie :

  • l'apparition précoce de la maladie entre 20 et 30 ans ;
  • une atteinte répétée et fréquente des glandes parotides ;
  • des poussées de purpura.

Bon à savoir : ces patients font l'objet d'une surveillance particulière. Dans tous les cas, une personne atteinte du syndrome de Gougerot doit consulter rapidement un médecin en cas d'apparition d'un nouveau symptôme.

Traitements du syndrome de Gougerot

À ce jour, il n'existe pas de traitement pour soigner le syndrome de Gougerot, seuls les symptômes peuvent être soulagés. Devant la très grande variabilité des symptômes, le médecin adapte le traitement au cas spécifique de chaque patient.

Le traitement du syndrome de Gougerot comprend plusieurs aspects :

  • Différentes règles d'hygiène et de vie :
    • la suppression des facteurs favorisant la sécheresse buccale ou oculaire (certains médicaments, travail sur ordinateur, tabac, vent, climatisation...) ;
    • une bonne hygiène bucco-dentaire ;
    • un savon surgras contre la sécheresse cutanée ;
    • des instillations de sérum physiologique contre la sécheresse nasale ;
    • des exercices physiques adaptés pour maintenir la souplesse des articulations.
  • Le traitement des symptômes du syndrome sec :
    • des médicaments contre la sécheresse oculaire ou buccale : larmes artificielles, substituts salivaires ;
    • le chlorhydrate de pilocarpine pour traiter le syndrome sec.
  • Le traitement des atteintes systémiques :
    • le traitement des douleurs par des antalgiques (paracétamol, anti-inflammatoires non stéroïdiens) ;
    • l'hydroxychloroquine (Plaquenil®, un antipaludéen aujourd'hui autorisé en tant qu'anti-rhumatismal) pour le traitement de fond des douleurs articulaires, d'autant qu'elle est aussi indiquée dans le traitement du lupus ;
    • le traitement spécifique des différentes atteintes localisées ;
    • en cas de complications graves, le traitement par des corticoïdes ou des immunosuppresseurs, voire le recours aux biothérapies.
  • La prise en charge de la fatigue et de l'état émotionnel du patient est indispensable (soutien psychologique, aide à la reconversion professionnelle, etc.). 

Le syndrome de Gougerot n'appartient pas aux maladies prises en charge à 100 % par l'assurance maladie. Cependant, le médecin peut effectuer une demande de protocole de soins, pour une prise en charge du patient à 100 %, pour les patients présentant une forme systémique sévère nécessitant un traitement par immunosuppresseurs ou biothérapies.

À noter : une étude américaine a mis en évidence un effet tératogène de l’hydroxychloroquine avec un risque de malformations graves multiplié par 1,33 par rapport aux enfants non exposés lorsque la dose journalière était supérieure ou égale à 400 mg (source : ANSM, 5 avril 2023).

Syndrome de Gougerot chez l'enfant

Survenant aux environs de 10 ans, le syndrome de Gougerot de l'enfant est une pathologie extrêmement rare. Comme chez l'adulte, le syndrome de Gougerot peut être :

  • primitif, sans autre maladie associée ;
  • secondaire, associé à une autre maladie auto-immune (lupus systémique, arthrite juvénile idiopathique (ensemble des inflammations articulaires sans cause connue survenant avant 16 ans et d'une durée supérieure à 6 semaines), connectivite mixte (maladie inflammatoire chronique présentant des symptômes de lupus, de sclérodermie et de polymyosite).

Comme chez les adultes, les filles sont plus touchées avec 70 % des cas. Le diagnostic et le traitement de la maladie sont identiques à ceux de l'adulte.

Bon à savoir : chez l'enfant, l'atteinte des glandes lacrymales et le gonflement des glandes parotides sont fréquents. L'enfant atteint présente des conjonctivites répétées, de la fièvre et éventuellement des douleurs articulaires. Les autres atteintes systémiques sont plus rares.

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